Le Sénégal entre dans une nouvelle ère économique. L’exploitation du pétrole et du gaz, longtemps attendue, commence à se traduire dans les chiffres de l’industrie. Selon les dernières données de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), publiées fin septembre 2025, les revenus des industries extractives connaissent une croissance exceptionnelle, portée par le démarrage effectif de la production pétrolière et l’essor des minerais métalliques.

Un tournant historique pour l’économie

Jamais le secteur extractif n’avait affiché de tels résultats. Au deuxième trimestre 2025, le chiffre d’affaires de la branche a bondi de près de 70 %, une performance inédite qui marque une rupture par rapport aux années précédentes. Sur l’ensemble du premier semestre, les revenus progressent de plus de 65 % par rapport à 2024.

Ce dynamisme est directement lié au lancement de la production pétrolière, combiné à une forte hausse des ventes de minerais métalliques. Le pays commence ainsi à récolter les premiers fruits d’une stratégie patiemment construite depuis la découverte des gisements offshore.

Une industrie tirée par les extractifs

L’effet des hydrocarbures se diffuse à l’échelle de l’industrie nationale. Globalement, la valeur du secteur industriel s’est accrue de plus de 23 % au deuxième trimestre. Si les hydrocarbures apparaissent comme la locomotive, le secteur manufacturier progresse de 5,4 % et l’énergie de 4,8 %.
Mais la dynamique reste inégale : les autres segments de l’extraction, notamment certaines filières minières, reculent de plus de 30 %. Hors hydrocarbures et coton, la croissance industrielle plafonne autour de 8 %, un signe que l’économie demeure très dépendante de la rente extractive.

Les promesses et les risques

Pour les autorités sénégalaises, cette envolée est un signe encourageant. Le pays voit enfin se concrétiser ses ambitions de diversification économique, avec l’industrie comme pilier de croissance. Cependant, les analystes rappellent que la dépendance aux hydrocarbures peut être un piège : volatilité des prix, risques environnementaux et difficulté à transformer cette manne en emplois massifs.

Le véritable défi réside donc dans la capacité à transformer les revenus tirés du pétrole et du gaz en investissements durables dans les infrastructures, l’agriculture, l’éducation et la formation. Autrement dit, convertir la rente en levier de développement inclusif.

Une étape décisive

Le Sénégal vit un moment charnière. Le boom extractif offre une fenêtre d’opportunité rare pour bâtir une économie plus solide et diversifiée. Mais l’histoire regorge d’exemples de pays piégés par la « malédiction des ressources ».

La question n’est donc plus de savoir si les hydrocarbures propulsent l’industrie sénégalaise — c’est déjà le cas. La vraie interrogation est : jusqu’où ce boom profitera-t-il aux Sénégalais eux-mêmes ?

La Rédaction