Sénégal 2025 : Année d’épreuves économiques et financières entre tensions budgétaires, dette sous pression et réformes urgentes.
L’année 2025 restera dans les mémoires comme une période particulièrement éprouvante pour l’économie sénégalaise. Entre défis budgétaires persistants, hausse de la dette publique, pression internationale pour la transparence et stratégies de redressement ambitieuses, le gouvernement a dû affronter une succession de turbulences qui ont fortement marqué les finances publiques et les perspectives de croissance du pays.
Une croissance réelle mais sous pression
Sur le plan de l’activité, l’économie sénégalaise a connu une dynamique de croissance soutenue. D’après des projections récentes, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de 2025 est estimée à environ 7,9 %, portée notamment par une reprise de l’agriculture et la première année complète de production pétrolière et gazière commercialisée, ainsi que par des performances solides dans les services non liés aux hydrocarbures. Cette trajectoire fait du Sénégal l’un des pays les plus dynamiques de la région ouest-africaine cette année-là.
Cependant, ces chiffres ne reflètent pas automatiquement le niveau de bien-être économique ou la qualité des finances publiques : ils masquent des tensions budgétaires et des fragilités structurelles persistantes.
Finances publiques sous pression
L’un des principaux défis de 2025 a été la maîtrise des comptes publics. Selon les derniers rapports d’exécution budgétaire, au 30 septembre 2025, le déficit budgétaire s’élevait à 4,88 % du PIB, en dessous de l’objectif de 7,8 % fixé par le gouvernement, mais nettement au-dessus du critère de convergence de l’UEMOA de 3 %. Ce déficit traduit une dépense publique importante, combinée à des recettes encore trop faibles pour couvrir l’ensemble des besoins.
Les rigidités budgétaires sont multiples :
- La masse salariale représente plus de 33 % des dépenses ordinaires ;
- Les charges de la dette absorbent près de 21,9 % des dépenses ordinaires ;
- Les subventions énergétiques ont augmenté de plus de 50 %, gonflant les transferts budgétaires.
Cette structure de dépenses étirée complique la gestion des équilibres publics et laisse moins de marge pour l’investissement social ou la stimulation de la croissance inclusive.
Dette publique : un thème central et controversé
La question de la dette publique a été au centre des débats économiques de l’année. Des audits antérieurs avaient révélé des dettes « cachées » substantielles héritées de périodes précédentes, menant à des révisions à la hausse du ratio dette/PIB, qui avait déjà atteint près de 119 % fin 2024 selon les autorités sénégalaises.
Dans ce contexte, l’inspection du Fonds monétaire international (FMI) a recommandé des réformes structurelles et plus de transparence budgétaire, mettant en lumière des irrégularités dans la déclaration des dettes et du déficit pour les années précédentes.
Malgré ces appels à des mesures drastiques, le gouvernement du Prime ministre Ousmane Sonko a clairement exclu la restructuration de la dette, jugée selon lui comme une atteinte à la souveraineté nationale, même si cela crée des tensions avec certains partenaires internationaux et des analystes financiers.
Réformes et plan de redressement : un cap difficile à tenir
Face à ces défis, Dakar a tenté de tracer une nouvelle trajectoire économique pour réduire sa dépendance à l’endettement externe et renforcer ses finances publiques. En août 2025, le gouvernement a dévoilé un plan de redressement économique fondé sur le financement domestique, qui prévoit de mobiliser près de 4 600 milliards de FCFA de ressources internes entre 2025 et 2028, tout en réduisant les dépenses publiques et en élargissant l’assiette fiscale (notamment via la taxation de secteurs auparavant exonérés).
Cependant, ces mesures se heurtent à une réalité sociale et politique délicate, car une pression fiscale accrue ou des réductions budgétaires touchent des secteurs sensibles comme la santé, l’éducation ou les subventions sociales.
Partenariats internationaux et appui aux réformes
La Banque mondiale a apporté un soutien ciblé au Sénégal en approuvant en juin 2025 un financement concessionnel de 115 millions de dollars, destiné à renforcer la gestion des finances publiques, la durabilité de la dette et la mobilisation des ressources internes. Ce soutien s’inscrit dans le cadre du programme national SEN-FISCALE (2025-2029) qui vise notamment à accroître la transparence et l’efficacité de la gestion budgétaire.
Le FMI, malgré des frictions sur certains points (comme la restructuration), continue d’insister sur l’opportunité de renforcer la discipline budgétaire et la transparence financière pour restaurer la confiance des marchés.
Si 2025 a montré que l’économie sénégalaise peut encore croître à des rythmes enviables dans la sous-région, l’année restera surtout marquée par un examen brutal des fondements de sa politique économique et financière. Entre déficits élevés, dette sous tension et réformes délicates, le Sénégal a confronté une réalité que seules des solutions structurelles profondes pourront apaiser. À l’aube de 2026, le véritable défi ne sera plus seulement de soutenir la croissance, mais de la rendre durable, soutenable et partagée, faute de quoi les fragilités actuelles risquent de peser encore plus lourd demain.
La Rédaction

