Fonds africain de développement : 11 milliards de dollars pour changer d’échelle.
Le Fonds africain de développement (FAD) vient de franchir un seuil symbolique et stratégique. À l’issue de la 17ᵉ reconstitution de ses ressources (FAD-17), le guichet concessionnel de la Banque africaine de développement (BAD) a mobilisé 11 milliards de dollars, un montant historique dans un contexte mondial marqué par la contraction de l’aide publique et la montée des risques économiques.
Cette mobilisation, annoncée en décembre 2025 à Londres, envoie un signal clair : malgré les tensions budgétaires internationales, l’Afrique reste au cœur des priorités du financement du développement.
Un record dans un contexte mondial contraint
La performance du FAD est d’autant plus notable qu’elle intervient à un moment où de nombreux pays donateurs réduisent leurs engagements extérieurs. Avec 11 milliards USD, le FAD-17 enregistre une hausse d’environ 23 % par rapport au cycle précédent (FAD-16), qui avait mobilisé 8,9 milliards USD.
La conférence de reconstitution, coorganisée par le Royaume-Uni et le Ghana, a réuni 43 partenaires, confirmant la confiance des bailleurs dans la capacité de la BAD à transformer des ressources concessionnelles en projets concrets à fort impact.
Un tournant majeur, l’Afrique contribue à son propre Fonds
C’est l’un des faits les plus marquants de ce cycle : 23 pays africains ont contribué financièrement à la reconstitution du FAD, pour un montant total de 182,7 millions USD, contre un niveau marginal lors des cycles précédents.
Parmi eux, 19 pays participaient pour la première fois, illustrant un changement profond de posture. L’Afrique ne se positionne plus uniquement comme bénéficiaire de l’aide, mais comme acteur et cofinanceur de son développement.
Ce signal politique est fort : il renforce la crédibilité du Fonds et ouvre la voie à une appropriation africaine accrue des priorités de développement.
Vers un nouveau modèle, de l’aide à l’investissement
Au-delà du montant, le FAD-17 marque une évolution structurelle du modèle financier. Le Fonds s’oriente désormais vers une logique plus proche de l’investissement que de l’aide traditionnelle.
Concrètement, cela signifie :
- une capacité accrue à lever des ressources sur les marchés,
- l’introduction d’instruments financiers innovants,
- une meilleure mobilisation du capital privé,
- un effet de levier renforcé : chaque dollar du FAD permet déjà de mobiliser plus de 2,5 dollars supplémentaires.
L’objectif est clair : faire du FAD un catalyseur de transformation économique, capable d’absorber plus de risques tout en finançant des projets structurants.
Des priorités ciblées pour les pays les plus vulnérables
Les ressources du FAD-17 seront déployées au bénéfice de 37 pays africains à faible revenu ou en situation de fragilité. Les financements se concentreront sur cinq axes majeurs :
- accès à l’énergie et transition énergétique,
- sécurité alimentaire et transformation agricole,
- capital humain (éducation, santé, emploi),
- intégration régionale et commerce intra-africain,
- infrastructures résilientes face aux chocs climatiques et économiques.
Un accent particulier sera maintenu sur les pays sortant de crise, via des mécanismes dédiés d’appui à la transition.
Un message politique et économique fort
Dans un environnement international incertain, la réussite du FAD-17 constitue un message de confiance adressé aux marchés, aux investisseurs et aux gouvernements africains. Elle confirme le rôle central de la Banque africaine de développement comme pilier du financement du développement sur le continent.
Lever 11 milliards de dollars dans un monde où l’aide se raréfie n’est pas un simple succès comptable. C’est la preuve que le financement du développement africain est en train de changer de nature. Moins dépendant, plus stratégique, davantage tourné vers l’investissement et la responsabilité partagée, le FAD-17 esquisse une nouvelle trajectoire : celle d’une Afrique qui finance son avenir avec ses partenaires, mais aussi avec elle-même.
La Rédaction



