Burkina Faso : Quand le pays ose former ses ingénieurs du futur, du nucléaire à l’aéronautique.
Former des ingénieurs en nucléaire et en aéronautique au Burkina Faso. L’idée aurait pu sembler irréaliste il y a encore quelques années. Elle est désormais couchée noir sur blanc. Le gouvernement burkinabè a officiellement validé la création d’une Académie technologique du Faso, un établissement d’enseignement supérieur dédié aux formations d’ingénieurs dans des secteurs jugés stratégiques pour l’avenir du pays.
Derrière cette annonce, une ambition claire : reprendre la main sur les compétences scientifiques et industrielles, dans un contexte de profonde recomposition économique et géopolitique.
Une décision actée au sommet de l’État
Le projet a été validé lors d’un Conseil des ministres tenu en décembre 2025, avec l’adoption d’un rapport portant sur la construction de cette nouvelle académie. L’établissement sera implanté à Pabré, à une trentaine de kilomètres de Ouagadougou, sur un site d’environ 60 hectares.
Le budget annoncé dépasse 37 milliards de FCFA, financé par le budget national, et couvre la première phase du projet : études techniques, conception architecturale et construction des principales infrastructures pédagogiques.
Des filières stratégiques assumées
L’Académie technologique du Faso ne se limite pas aux formations classiques. Les autorités affichent une ambition nettement plus large, avec des cursus prévus dans :
- le nucléaire,
- l’aéronautique,
- l’énergie,
- la mécanique et la métallurgie,
- le génie civil,
- la chimie,
- les technologies numériques et les télécommunications.
Pour un public non spécialisé, cela signifie une chose simple : former sur place les ingénieurs dont le pays a besoin, au lieu de dépendre exclusivement de formations à l’étranger, coûteuses et souvent sélectives.
Pourquoi le nucléaire et l’aéronautique
Le choix de ces deux domaines n’est pas anodin. Le nucléaire est aujourd’hui au cœur des débats mondiaux sur l’énergie, la souveraineté et la sécurité. L’aéronautique, elle, est indispensable au développement du transport, de la maintenance aérienne, de la surveillance du territoire et des services logistiques.
Le Burkina Faso ne part pas de zéro. Ces dernières années, le pays a multiplié les partenariats internationaux, notamment avec la Russie, pour la formation de ses étudiants dans les domaines scientifiques et énergétiques. Des bourses d’études spécialisées en sciences nucléaires ont déjà été attribuées à des étudiants burkinabè à l’étranger.
La future académie vise à internaliser progressivement ces compétences, en les adaptant aux réalités locales et régionales.
Un défi technique et humain majeur
Former des ingénieurs en nucléaire ou en aéronautique ne se décrète pas. Cela suppose :
- des enseignants hautement qualifiés, souvent rares,
- des laboratoires et équipements spécialisés, très coûteux,
- des normes de sécurité strictes,
- et des partenariats universitaires et industriels solides.
Même dans des pays industrialisés, ces filières demandent des années de maturation. Les autorités burkinabè en sont conscientes et envisagent un déploiement progressif, avec des formations de base dans un premier temps, avant une montée en gamme.
Un pari sur la souveraineté scientifique
Au-delà de l’enseignement, le projet porte une dimension politique et économique forte. Il s’agit de réduire la dépendance extérieure, de retenir les talents, et de bâtir un socle de compétences capable d’accompagner l’industrialisation du pays et du Sahel.
À terme, l’Académie technologique du Faso pourrait également accueillir des étudiants étrangers, positionnant le Burkina Faso comme un pôle régional de formation scientifique et technique.
Une ambition qui engage l’avenir
L’Académie technologique du Faso ne résoudra pas, à elle seule, les défis économiques du pays. Mais elle marque un tournant : celui d’un État qui choisit d’investir dans le temps long, là où les résultats ne sont ni immédiats ni garantis.
Former un ingénieur prend des années. Former une génération capable de transformer un pays en prend encore davantage. Le Burkina Faso vient d’en faire le pari.
Et dans un monde où la compétence devient la première richesse, ce pari pourrait bien être le plus stratégique de tous.
La Rédaction


