
Burkina Faso : La BAD pousse le pays à miser sur ses propres ressources pour bâtir une économie résiliente.
Le Burkina Faso est à un tournant stratégique de son développement. Dans un contexte de baisse progressive des financements extérieurs, de crises sécuritaires persistantes et de pression sur les finances publiques, la Banque africaine de développement (BAD) invite le pays à capitaliser sur ses propres ressources humaines, naturelles et financières pour bâtir une économie plus résiliente et autonome.
C’est le message clé du Rapport pays 2025, déclinaison nationale des Perspectives économiques en Afrique, présenté le 18 juillet 2025 depuis Ouagadougou, lors d’une rencontre virtuelle ayant réuni plus de 80 participants issus de l’administration, du secteur privé, du monde académique et des partenaires techniques et financiers.
Une croissance qui résiste aux crises multiples
Malgré les défis sécuritaires, les urgences humanitaires et les aléas climatiques, l’économie burkinabè a montré des signes de résilience en 2024.
Selon la BAD, le PIB a progressé de 5 %, soutenu principalement par le secteur agricole, les mines d’or, et la consommation intérieure.
Cependant, cette croissance reste fragile, car elle dépend encore largement de l’évolution des cours de l’or et des performances agricoles, vulnérables aux chocs climatiques et à l’insécurité dans les zones rurales.
Le défi, selon la BAD, est de transformer cette croissance conjoncturelle en développement structurel, en misant sur la création de valeur locale et l’inclusion socio-économique des jeunes et des femmes.
Miser sur ses ressources internes : un impératif pour l’avenir
Le rapport met en lumière un fait préoccupant : la dépendance du Burkina Faso à l’aide extérieure diminue, mais les ressources internes restent sous-exploitées.
Pour renforcer son autonomie financière, la BAD recommande trois axes majeurs :
- Moderniser l’agriculture et développer l’agro-industrie : le pays dispose de terres arables importantes, mais la productivité reste faible. La transformation locale du coton, du sésame, du maïs et des fruits peut créer de la valeur ajoutée et des emplois durables.
- Renforcer la fiscalité, notamment minière : alors que l’or représente plus de 70 % des exportations, la contribution du secteur au budget national reste limitée. La BAD recommande une meilleure capture des revenus miniers et la lutte contre l’évasion fiscale.
- Investir dans le capital humain : la jeunesse burkinabè, qui représente plus de 65 % de la population, doit être formée, insérée et valorisée dans les secteurs productifs. La formation technique et professionnelle est identifiée comme un levier clé pour accélérer la transformation économique.
Une mobilisation fiscale déjà remarquable dans l’UEMOA
Malgré les difficultés, le Burkina Faso est déjà cité en exemple dans la mobilisation des ressources domestiques.
Avec un taux de pression fiscale de 17,8 %, le pays se positionne parmi les meilleurs performeurs de l’UEMOA, même si l’objectif communautaire est de 20 %.
Cette capacité à mobiliser ses recettes propres renforce la confiance des bailleurs et permet de financer des services publics essentiels tels que l’éducation, la santé et les infrastructures rurales.
Pour Abdoulaye Diop, président de la Commission de l’UEMOA, « le Burkina Faso est sur la bonne voie, mais il doit transformer ces performances fiscales en développement durable et création d’emplois locaux ».
Investissements de la BAD et défis persistants
La BAD accompagne déjà activement le pays, avec plus de 1,2 milliard de dollars investis dans 115 projets couvrant :
- les infrastructures routières et énergétiques,
- l’agriculture et la sécurité alimentaire,
- l’eau potable et la résilience climatique.
Mais la mise en œuvre de ces projets reste ralentie par l’insécurité, la lenteur administrative et les défis de gouvernance.
Le rapport 2025 insiste sur la nécessité de renforcer la transparence et la redevabilité pour maximiser l’impact des financements.
Vers une économie autonome et résiliente
Pour la BAD, le développement futur du Burkina Faso passera par l’appropriation de ses leviers de croissance.
Comme le souligne Daniel Ndoye, responsable-pays de la BAD, « le Burkina Faso a prouvé sa capacité à résister aux chocs. Le prochain défi est de transformer cette résilience en autonomie économique, en valorisant ses richesses naturelles et humaines ».
Ce message s’inscrit dans une tendance régionale où plusieurs pays sahéliens cherchent à réduire leur dépendance à l’aide internationale et à repenser leur modèle de développement autour de la mobilisation des ressources internes.
La Rédaction