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Afrique : Le FMI tire la sonnette d’alarme sur la conversion des dettes en dollars vers le yuan.

Face à l’étau financier qui se resserre, plusieurs pays africains révisent leurs stratégies d’endettement. Objectif : réduire le coût de la dette extérieure, largement libellée en dollars. Leur solution ? Convertir une partie de ces emprunts vers le yuan chinois. Une opération audacieuse… et risquée, selon le Fonds monétaire international (FMI), qui met en garde contre une exposition accrue à une devise encore peu utilisée dans les réserves africaines.


Un mécanisme qui séduit : des économies immédiates pour les États

Derrière cette ruée vers le yuan, la motivation est limpide : soulager des finances publiques malmenées par la flambée du dollar et la hausse des taux d’intérêt américains.
Le cas le plus emblématique est celui du Kenya, qui a converti un prêt chinois de près de 5 milliards USD destiné au chemin de fer SGR en yuan, engrangeant ainsi une économie annuelle d’environ 215 millions USD en service de dette. Un geste salué pour son ingéniosité financière… mais observé avec une certaine nervosité par les économistes internationaux.

Selon les explications du FMI recueillies dans des analyses publiées par Bloomberg et Finance in Africa, ces ajustements peuvent être « pertinents » pour réduire la pression immédiate sur les budgets nationaux. Mais la médaille a un revers.


Pourquoi le FMI s’inquiète : des risques moins visibles, mais bien réels

Si le yuan coûte moins cher à gérer aujourd’hui, il peut coûter beaucoup plus demain. Le FMI insiste sur plusieurs dangers :

1. Une exposition accrue aux variations du yuan

Le yuan n’a pas la même profondeur de marché que le dollar. Ses fluctuations peuvent devenir une source de vulnérabilité pour des États dont l’économie, les exportations et les réserves restent largement adossées au billet vert.

2. Un besoin urgent de diversifier les réserves nationales

À dette en yuan, réserves en yuan. C’est mathématique.
Problème : peu de pays africains disposent aujourd’hui de stocks suffisants de la monnaie chinoise, ce qui les obligera à réorganiser en profondeur leur gestion de change.

3. Un risque de dépendance accrue vis-à-vis de la Chine

En échangeant des dettes chinoises en dollars contre des dettes chinoises en yuan, les pays consolidèrent encore plus leur relation financière avec Pékin, dans un contexte où les marges de renégociation sont souvent étroites.

4. L’absence de stratégie claire dans certains pays

L’avertissement du FMI est direct : une conversion n’a de sens que si elle s’intègre dans un plan cohérent de gestion de dette à moyen terme.
En clair : pas de bricolage comptable, mais une vision de long terme.


Le yuan, nouvelle étoile montante en Afrique ?

Derrière cette recomposition monétaire, un mouvement structurel se dessine : celui d’une montée en puissance du yuan dans les financements africains.
De plus en plus de pays examinent la possibilité d’émettre des obligations en yuan, d’indexer des contrats ou de renégocier des prêts chinois dans la devise de Pékin.

Pour l’Afrique, c’est un pari : diversifier ses partenaires, contourner la force du dollar, obtenir de meilleures conditions… mais sans se faire piéger par un nouveau risque monétaire qu’elle maîtrise encore imparfaitement.


À vouloir s’alléger d’un fardeau, certains États africains pourraient bien en soulever un autre. Car au-delà des conversions et des équations financières, il y a une vérité que le FMI rappelle sans détour : changer la monnaie d’une dette ne change pas la réalité de la dette elle-même.
Et dans un monde économique de plus en plus multipolaire, chaque choix monétaire est aussi un choix stratégique. Encore faut-il être sûr de la route qu’on emprunte.

La Rédaction

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