Afrique : Face à un déficit de 402 milliards USD par an, la BAD mise sur le capital privé pour changer d’échelle.
Le chiffre donne le vertige : 402 milliards de dollars par an. C’est le montant du déficit annuel de financement du développement en Afrique, selon les estimations de la Banque africaine de développement (BAD). Un gouffre financier qui freine la construction d’infrastructures, l’accès à l’énergie, le financement des PME et, plus largement, la transformation économique du continent.
Face à cette réalité, la BAD a décidé de changer de méthode. Désormais, l’institution panafricaine veut faire du capital privé un levier central du développement africain, en complément des financements publics et concessionnels traditionnels.
Un déficit structurel devenu insoutenable
Routes inachevées, réseaux électriques insuffisants, systèmes de santé sous-financés, besoins colossaux en éducation et en industrialisation : le déficit de financement africain n’est ni conjoncturel ni marginal. Il est structurel.
Selon la BAD, les ressources publiques et l’aide internationale ne suffisent plus à couvrir les besoins croissants des économies africaines. Résultat : chaque année, près de 402 milliards USD manquent à l’appel pour financer le développement du continent.
Ce constat a été rappelé avec force lors de la Africa Private Capital Mobilisation Day, organisée à Londres le 17 décembre 2025, à l’initiative de la BAD, en partenariat avec le Royaume-Uni.
Mobiliser le capital privé mondial : le nouveau pari de la BAD
Consciente des limites du financement classique, la BAD cherche désormais à rediriger une partie des capitaux privés mondiaux vers l’Afrique. Fonds de pension, fonds souverains, compagnies d’assurance, investisseurs institutionnels : ces acteurs gèrent des milliers de milliards de dollars, mais restent encore peu exposés aux marchés africains.
L’enjeu pour la BAD est clair :
réduire la perception du risque,
structurer des projets bancables,
créer des instruments financiers attractifs, et sécuriser l’investissement privé grâce à des mécanismes de garantie et de partage de risques.
Lors de la rencontre de Londres, plus de 150 acteurs internationaux du capital privé ont été réunis pour passer d’un discours d’intention à une logique d’actions concrètes.
Blended finance, garanties et plateformes d’investissement
Pour attirer ces capitaux, la BAD mise sur plusieurs outils clés :
- le financement mixte (blended finance), combinant fonds publics et privés ;
- des garanties de crédit pour réduire le risque perçu ;
- la structuration de projets à grande échelle, capables d’absorber des volumes importants de capitaux ;
- le renforcement des marchés financiers africains.
L’objectif n’est pas seulement de financer des projets, mais de changer durablement l’architecture du financement du développement en Afrique, en faisant du secteur privé un partenaire central.
Des secteurs stratégiques en ligne de mire
Les capitaux privés ciblés par la BAD doivent irriguer des secteurs clés :
- les infrastructures de transport et de logistique,
- l’énergie, notamment renouvelable,
- l’agro-industrie,
- le financement des PME et industries locales,
- les services sociaux essentiels.
Autant de domaines où les besoins sont immenses et où les retombées économiques et sociales peuvent être rapides et durables.
Un changement de paradigme pour l’Afrique
La démarche de la BAD marque un tournant stratégique. Il ne s’agit plus seulement de rechercher plus d’aide, mais de mobiliser intelligemment le capital mondial, en alignant rentabilité financière et impact économique.
Ce changement de paradigme répond à une réalité simple : l’Afrique ne manque pas de projets, elle manque de financements structurés capables d’attirer des investisseurs à long terme.
Avec un déficit annuel de financement estimé à 402 milliards de dollars, l’Afrique n’a plus le luxe d’attendre. En faisant du capital privé un pilier de sa stratégie, la Banque africaine de développement tente de transformer un problème chronique en opportunité historique. Reste désormais l’épreuve décisive : convertir les milliards potentiels en investissements réels, visibles et utiles. Car au final, le développement ne se mesure pas aux promesses de capitaux, mais à leur capacité à changer concrètement la vie des populations.
La Rédaction

