
Contrats miniers dans l’AES : Des accords déséquilibrés au détriment de la souveraineté.
Depuis plusieurs décennies, les contrats miniers signés entre les États africains et des multinationales étrangères sont au cœur de vives critiques. Mais avec l’arrivée au pouvoir des autorités de transition dans les pays de l’AES (Mali, Burkina Faso, Niger), cette problématique a été placée au centre du débat public. L’un des griefs majeurs réside dans le déséquilibre flagrant de ces accords qui, loin de favoriser un développement local durable, profitent essentiellement aux entreprises étrangères.
Des termes biaisés dès la signature
L’une des principales failles dénoncées par l’expert malien Badi Haïdara est l’asymétrie d’information lors de la signature des contrats. En effet, les études géologiques initiales, qui permettent d’évaluer la quantité, la qualité et la rentabilité des gisements, sont souvent financées par les entreprises elles-mêmes. Cette situation place les États en position de faiblesse, les empêchant de négocier des termes équitables.
À cette réalité s’ajoute un contexte institutionnel fragile, où l’opacité, la corruption et la pression internationale ont longtemps empêché une réforme en profondeur du secteur extractif.
Des revenus dérisoires pour les États
Les chiffres sont sans appel. Dans de nombreux contrats miniers, l’État ne perçoit que 10 à 20 % des revenus générés par l’exploitation, souvent sous forme de participation symbolique au capital des sociétés minières. Les entreprises étrangères conservent donc l’essentiel des bénéfices, renforcés par des exonérations fiscales généreuses et des clauses de stabilité fiscale qui figent les conditions pendant plusieurs années, interdisant tout ajustement par l’État.
Aucune valeur ajoutée locale
Au-delà de la question fiscale, ces contrats ne prévoient que très peu de transfert de technologie, de création d’emplois qualifiés ou encore d’achats locaux de biens et services. Résultat : les retombées économiques sont marginales pour les communautés locales.
Le volet environnemental est tout aussi préoccupant. Cyanure, mercure, destruction des terres agricoles ou pastorales : les dégâts écologiques sont rarement réparés, les populations rarement indemnisées. Les politiques de Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) restent inexistantes ou symboliques.
Un héritage colonial toujours présent
Ces déséquilibres ne sont pas dus au hasard. Ils s’inscrivent dans un cadre historique plus large, marqué par des législations minières héritées de la période coloniale et renforcées par des logiques néolibérales de dérégulation. Ce modèle, aujourd’hui remis en question, maintient les pays de l’AES dans une situation de dépendance vis-à-vis de puissances étrangères avides de sécuriser leur approvisionnement en ressources stratégiques.
Les contrats miniers actuels participent à une dépossession silencieuse des richesses africaines. Pour les pays de l’AES, la révision ou la renégociation de ces accords n’est pas seulement une nécessité économique : c’est un impératif de souveraineté.
La Rédaction