Afrique subsaharienne : 60 épisodes de baisse de la dette enregistrés en 20 ans, selon le FMI.

Dans un contexte mondial marqué par des tensions budgétaires et des craintes accrues autour du surendettement des pays africains, une récente analyse du Fonds monétaire international (FMI) vient nuancer les perceptions dominantes. L’institution met en lumière une réalité souvent occultée : l’Afrique subsaharienne a enregistré plus de 60 épisodes significatifs de désendettement sur les deux dernières décennies.
Une capacité d’ajustement souvent sous-estimée
Contrairement à l’image d’une région systématiquement piégée par la dette, l’Afrique subsaharienne a démontré sa capacité à stabiliser et réduire ses niveaux d’endettement. En moyenne, un pays de la région a une chance sur quatre de vivre une phase de désendettement au cours d’une année donnée.
Ces ajustements ne sont pas seulement conjoncturels. Dans la majorité des cas observés par le FMI, la réduction du ratio dette/PIB a dépassé les 10 points de pourcentage et s’est inscrite dans la durée, souvent sur des périodes de quatre ans ou plus.
Des exemples concrets et instructifs
Certains pays ont réussi des ajustements notables, malgré des conditions économiques parfois défavorables. La République Démocratique du Congo, par exemple, a réduit son ratio d’endettement de 15 points entre 2010 et 2023. Le Cap-Vert a quant à lui enregistré une contraction de plus de 30 points sur la période 2021-2023. Maurice, entre 2003 et 2008, a également réduit sa dette de près de 20 points de PIB, grâce à une combinaison de croissance soutenue, stabilité monétaire et discipline budgétaire.
Les facteurs de réussite
Trois leviers majeurs ressortent des cas de désendettement réussis :
- Une gouvernance budgétaire crédible et des institutions solides : ces facteurs permettent de maintenir la confiance des bailleurs et d’éviter les dérapages hors budget.
- Une croissance économique robuste, qui renforce les recettes fiscales et offre des marges de manœuvre pour ajuster les finances publiques.
- Un environnement extérieur favorable, caractérisé notamment par des taux d’intérêt modérés et un accès stable au financement concessionnel.
L’accompagnement du FMI, à travers des programmes de soutien économique, apparaît aussi comme un élément récurrent dans ces trajectoires vertueuses.
Réformes structurelles et discipline intelligente
Réduire la dette ne signifie pas nécessairement couper brutalement dans les dépenses sociales ou d’investissement. Le FMI insiste sur la nécessité d’un réalignement stratégique des politiques publiques : optimisation des dépenses, élargissement de l’assiette fiscale, priorisation des investissements à fort impact sur la productivité et la résilience.
Parmi les réformes structurelles clés figurent :
- La suppression des exonérations fiscales inefficaces ;
- L’instauration de règles budgétaires claires pour éviter les engagements non maîtrisés ;
- Une meilleure planification des projets publics, avec des critères de rentabilité économique.
Le rôle crucial de la communauté internationale
Pour les pays à faible revenu ou en situation fragile, la réussite d’un désendettement repose aussi sur le soutien extérieur. L’appui technique, le financement concessionnel, ou les partenariats avec des institutions multilatérales peuvent permettre d’éviter les arbitrages douloureux entre rigueur budgétaire et développement humain.
Ainsi, la discipline budgétaire ne doit pas être synonyme de restrictions aveugles, mais s’inscrire dans une stratégie globale visant à soutenir la croissance, protéger les acquis sociaux et renforcer les institutions.
Un impératif de souveraineté économique
Au final, cette étude du FMI rappelle qu’un désendettement efficace et soutenable est possible pour les économies africaines. Il exige toutefois une vision stratégique, une coordination étroite entre politique budgétaire et objectifs de développement, et une mobilisation des ressources domestiques.
Dans une Afrique confrontée à des défis multiples — changements climatiques, transitions énergétiques, pressions démographiques —, la capacité à gérer durablement la dette est non seulement un enjeu financier, mais aussi une condition de souveraineté économique.
La Rédaction