Samurai japonais : L’AFC décroche 524 millions de dollars pour relancer l’infrastructure africaine.
Quand le yen sourit à l’Afrique
L’Africa Finance Corporation (AFC), institution panafricaine spécialisée dans le développement des infrastructures, vient de frapper un grand coup sur les marchés financiers asiatiques. Le 2 décembre 2025, elle a clôturé une opération “Samurai” record de 524 millions de dollars US (equivalent dual-currency) sa plus importante à ce jour témoignant d’une confiance renouvelée des prêteurs japonais dans les projets africains.
Le prêt combine 505 millions USD et 3 milliards de yens, sur trois ans, et a été largement sursouscrit lors de son lancement.
Un double pari : levée de fonds et crédibilité internationale
Au-delà des montants, c’est un pari stratégique et symbolique que remporte l’AFC. Plusieurs éléments soulignent la portée de cette opération :
- Ce financement intervient après un prêt Samurai de 2022 (équivalent 419 millions USD) désormais remboursé, montrant que l’AFC maîtrise ses engagements et inspire confiance.
- L’opération a été arrangée par des banques japonaises majeures : Mizuho Bank, MUFG Bank, SMBC Bank International, avec la participation de nouveaux prêteurs comme des banques taïwanaises, ce qui élargit le cercle des bailleurs asiatiques de l’AFC.
- Ce succès renforce la position de l’AFC comme passerelle crédible entre capital asiatique et besoins d’infrastructures en Afrique, à une période où le continent cherche à combler d’énormes lacunes en routes, énergie, ports, transport, télécoms, etc.
Comme le résume Banji Fehintola, membre du conseil exécutif d’AFC en charge des services financiers : ce prêt “renforce la base de financement” de l’institution et étend son « rayonnement global », en démontrant que l’Afrique demeure un terrain d’investissement viable pour les marchés internationaux.
Pourquoi ce succès japonais ?
Plusieurs facteurs expliquent l’engouement des prêteurs nippons pour l’AFC :
- Notation de crédit solide : l’AFC bénéficie d’une notation long terme favorable, un élément rassurant pour des prêteurs recherchant la sécurité et la stabilité.
- Diversification des investisseurs japonais : cette opération a mobilisé non seulement les géants traditionnels, mais aussi des banques taïwanaises, ce qui élargit l’assise financière et réduit le risque de concentration.
- Timing opportun : l’opération est intervenue peu après un important sommet de coopération entre Afrique et Japon (Tokyo International Conference on African Development TICAD 9), ce qui a ravivé l’intérêt pour les actifs africains sur le yen-market.
Autrement dit : l’AFC est à la croisée des bons signaux : réputation, réseau, contexte favorable et elle les a exploités habilement.
Qu’est-ce que cela change pour l’Afrique ?
Ce financement de 524 millions USD marque plusieurs étapes importantes pour le continent :
- Un levier concret pour l’infrastructure, l’argent va permettre de financer des projets d’énergie, de transport, de logistique, d’industrie, de télécoms… des secteurs essentiels pour accompagner la croissance démographique et économique.
- Un appel d’air à d’autres investisseurs internationaux, en réussissant sur le marché Samurai, l’AFC montre qu’il existe un marché réel pour la dette africaine. Cela peut réveiller des fonds, des banques, des investisseurs institutionnels, prêts à parier sur l’Afrique si le cadre est sérieux.
- Un renforcement de la crédibilité de l’Afrique comme zone d’investissement, à une époque où le monde se détourne parfois des risques associés à l’Afrique, ce type d’opération prouve que, bien structurée, l’Europe, l’Asie ou le Moyen-Orient peuvent considérer le continent comme un investissement viable.
Pour l’AFC, c’est aussi une affirmation : l’institution n’est plus un simple “financier régional”, mais un acteur global capable de mélanger capital africain et marchés internationaux, avec la robustesse et la réputation qui en découlent.
Vers une nouvelle ère de financement : entre espoir et vigilance
Ce succès doit toutefois s’accompagner d’une dose de réalisme, l’argent seul ne suffit pas. Pour que la manne japonaise serve réellement le développement de l’Afrique, plusieurs conditions restent nécessaires :
- des projets structurés, transparents et bien gérés,
- des capacités nationales de mise en œuvre (ingénierie, suivi, maintenance, gouvernance),
- une mobilisation de contreparties locales, pour éviter que les infrastructures restent des coquilles vides.
En clair : ce prêt de 524 millions USD est une fenêtre ouverte. Le défi est désormais de la transformer en portes de sortie vers un développement durable, inclusif et tangible pour les populations africaines.
Avec cette opération, l’AFC montre la voie : l’Afrique peut financer ses ambitions… à condition d’assumer ensuite l’exécution.
La Rédaction



