BRVM : 600 milliards de FCFA de profits au premier semestre, un marché régional qui améliore sa rentabilité.
Les sociétés cotées à la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM) ont généré environ 600 milliards de FCFA de bénéfices nets au premier semestre, en hausse d’environ 18 % par rapport à la même période de l’année précédente. Un niveau qui confirme la montée en puissance de la place régionale, portée par les banques, les télécoms et quelques grands groupes industriels.
Selon le média spécialisé Sika Finance, les entreprises cotées sur la BRVM ont cumulé près de 600 milliards de FCFA de bénéfices sur le premier semestre, avec une progression d’environ 18 % en glissement annuel.
D’après cette synthèse, il s’agit du résultat net agrégé des sociétés cotées, toutes branches d’activité confondues.
Dans le détail, ce chiffre vient confirmer une tendance déjà observée ces dernières années : la BRVM, longtemps perçue comme une petite place de niche, produit désormais des niveaux de bénéfices et de dividendes qui n’ont plus rien d’anecdotique à l’échelle de l’UEMOA.
Plusieurs notes d’analyse de maisons de bourse et de banques d’investissement régionales, comme Attijari, rappellent que la croissance économique des pays de l’Union souvent supérieure à 5 % par an s’est traduite par une hausse continue des chiffres d’affaires et des résultats des entreprises phares cotées à Abidjan, siège de la BRVM.
Les banques et les télécoms en locomotives
Si le chiffre de 600 milliards de FCFA est global, il ne sort pas de nulle part. Les analystes rappellent que quelques grands secteurs pèsent très lourd dans la structure des bénéfices de la BRVM.
En tête, on retrouve :
- les banques : filiales de groupes panafricains et internationaux (BOA, Ecobank, NSIA, Orabank, SGCI, etc.), qui profitent d’une base de clientèle en expansion, d’une bancarisation progressive et de marges d’intermédiation encore élevées dans la zone ;
- les télécoms : avec des sociétés comme Sonatel ou Orange CI, qui restent des machines à cash, soutenues par la data, le mobile money et la croissance démographique ;
- ainsi que certaines entreprises industrielles et agro-industrielles qui tirent avantage de la demande intérieure et des exportations.
D’après les notes de marché publiées ces derniers mois, ce sont justement ces secteurs – banques et télécoms en premier lieu – qui ont surperformé en termes de bénéfices et de rentabilité, entraînant dans leur sillage l’agrégat global des résultats de la cote.
Autrement dit, derrière les 600 milliards de FCFA, une poignée de grandes capitalisations joue le rôle de moteur.
Des profits en hausse… et des dividendes qui suivent
La progression de 18 % des bénéfices semestriels s’inscrit également dans un contexte où les dividendes distribués par les sociétés de la BRVM sont en nette augmentation.
Une étude récente sur la place d’Abidjan souligne que le volume global de dividendes versés par les entreprises cotées a dépassé le seuil des 670 milliards de FCFA sur un exercice récent, en hausse par rapport à l’année précédente. Plusieurs sociétés – notamment dans la banque et les télécoms – affichent des taux de distribution généreux, ce qui renforce l’attractivité du marché pour les investisseurs en quête de revenus réguliers.
Pour un investisseur régional, y compris au Mali, cela veut dire concrètement deux choses :
- Les entreprises cotées génèrent des profits significatifs, avec une dynamique toujours orientée à la hausse.
- Une part croissante de ces profits est redistribuée sous forme de dividendes, ce qui fait de la BRVM une place intéressante pour les épargnants qui cherchent du rendement.
Un contexte macroéconomique porteur pour la zone UEMOA
Cette performance globale est aussi le reflet d’un environnement macroéconomique relativement favorable. Les pays de l’UEMOA ont, malgré les chocs multiples (Covid, inflation, tensions sécuritaires, resserrement monétaire), maintenu des taux de croissance parmi les plus élevés d’Afrique.
Les secteurs qui alimentent les bénéfices de la BRVM – finance, télécoms, services, agro-industrie – sont directement liés à :
- la croissance démographique de la région ;
- l’urbanisation rapide ;
- le développement des services financiers et numériques ;
- et un certain rattrapage en matière d’infrastructures et de consommation.
Des analystes soulignent en outre que plusieurs groupes ont engagé des programmes d’optimisation de coûts et d’amélioration de la productivité, ce qui se traduit, mécaniquement, par une meilleure rentabilité sur fond de hausse de volumes.
Un marché rentable mais encore sous-utilisé par les épargnants
Le paradoxe, relevé par plusieurs observateurs, est que cette rentabilité élevée ne se traduit pas encore par un afflux massif de nouveaux investisseurs individuels.
La BRVM reste, pour beaucoup de ménages et de petites entreprises de la région, une réalité lointaine.
Plusieurs freins sont régulièrement cités :
- faible culture boursière au sein du grand public ;
- perception de la bourse comme un univers réservé aux “initiés” ;
- manque d’information accessible sur les sociétés cotées et la manière d’investir ;
- contraintes pratiques (ouverture de compte-titres, procédures, coûts d’entrée).
Pourtant, avec des bénéfices en progression de 18 % sur un semestre et des dividendes qui augmentent, la BRVM offre des opportunités réelles pour diversifier l’épargne et financer l’économie régionale autrement que par les seuls dépôts bancaires.
Que signifie cette performance pour l’avenir de la BRVM ?
Les 600 milliards de FCFA de bénéfices cumulés au premier semestre envoient plusieurs signaux :
- La place régionale est rentable : les sociétés cotées ne sont pas des coquilles vides, mais des groupes qui gagnent de l’argent, y compris dans un contexte mondial incertain.
- Le potentiel de croissance reste important : la hausse de 18 % montre que, malgré les contraintes (coûts de financement, pression sur le pouvoir d’achat, environnement sécuritaire), les marges de progression sont encore là.
- La BRVM a les moyens de devenir un outil majeur de financement de la région si davantage d’entreprises s’y introduisent et si l’épargne locale est mieux orientée vers le marché boursier.
Les régulateurs et les acteurs de la place insistent d’ailleurs, dans leurs interventions publiques, sur la nécessité de :
- élargir la base d’investisseurs,
- accompagner davantage d’entreprises vers la cote,
- renforcer la transparence et la communication financière,
- et développer des produits adaptés à différents profils (petits porteurs, institutionnels, diaspora…).
Au final, ces 600 milliards de FCFA de bénéfices ne sont pas qu’un gros chiffre dans un communiqué : ils racontent l’histoire d’une bourse régionale qui a su s’installer dans le paysage économique ouest-africain, mais qui n’a pas encore tout dit de son potentiel.
Reste à savoir si, dans les années qui viennent, la BRVM restera surtout le terrain de jeu de quelques grandes entreprises et investisseurs avertis, ou si elle deviendra enfin ce qu’elle prétend être sur le papier : la bourse de l’ensemble des économies et des épargnants de l’UEMOA.
La Rédaction


