Afrique subsaharienne : Dangote et Thyssenkrupp tracent la route vers l’autosuffisance en engrais azotés.
L’Afrique subsaharienne pourrait bientôt réduire fortement sa dépendance aux engrais importés. Grâce à un partenariat ambitieux entre Dangote Fertiliser et Thyssenkrupp Uhde Fertilizer Technology, plusieurs unités modernes de production d’urée doivent être construites, ouvrant la voie à une production locale massive et à long terme.
Dangote Fertiliser a annoncé un accord avec Thyssenkrupp Uhde visant à ériger quatre unités de granulation d’urée, chacune d’une capacité d’environ 4 235 tonnes par jour. Cette technologie avancée, fondée sur un procédé de lit fluidisé (“fluid bed”), est très répandue dans l’industrie mondiale et reconnue pour sa robustesse et son efficacité.
Une ambition d’autonomie pour tout un continent
Avec ces nouvelles installations, Dangote envisage de porter sa production annuelle d’urée de 3 millions de tonnes à plus de 8 millions de tonnes. (Agence Ecofin) Cette montée en capacité n’est pas seulement destinée au Nigeria : elle cible une autosuffisance africaine.
Aliko Dangote, le fondateur du groupe, affirme que l’Afrique pourrait ne plus dépendre des importations d’engrais dans les 40 prochains mois. (Agence Ecofin) Cette ambition est soutenue par des bailleurs internationaux : plusieurs des projets sont financés par des institutions de développement.
Financement et partenaires
Deux des quatre centrales disposent déjà d’un financement concret :
- Le site de Bondoukou (50 MWc) est financé à hauteur d’environ 60 millions USD, avec la participation de la FMO (Pays-Bas) et de la DEG (Allemagne). (FMO)
- Le projet de Tongon (52 MWc) reçoit aussi des fonds : 28 millions d’euros apportés par l’Emerging Africa & Asia Infrastructure Fund (EAAIF). (EAAIF)
Ces financements montrent la confiance des bailleurs dans la stratégie de Dangote de développer des infrastructures de production d’engrais durable et local.
Impacts attendus sur l’agriculture africaine
La production locale d’urée à grande échelle pourrait avoir des conséquences majeures pour l’agriculture en Afrique :
- Réduction des coûts pour les agriculteurs, car les engrais importés sont souvent très chers.
- Amélioration de la productivité, grâce à une disponibilité plus stable et plus économique des intrants.
- Sécurité alimentaire renforcée, car plus d’agriculteurs pourront accéder à des quantités suffisantes d’engrais.
- Effet environnemental positif, si la production locale réduit les émissions liées au transport, bien que la production d’azote pose ses propres défis (émissions, consommation de gaz naturel).
Les défis à relever
Pour que ce projet ne reste pas qu’une promesse, plusieurs obstacles doivent être franchis :
- Infrastructure logistique : la production est une chose, mais il faudra transporter, stocker et distribuer ces engrais efficacement à travers le continent.
- Dépendance au gaz naturel : l’urée nécessite de l’ammoniac, qui dépend du gaz. Tout aléa sur les coûts du gaz pourrait peser lourd.
- Réglementation et politique : il faudra des cadres stables et des politiques incitatives pour garantir que ces engrais soient accessibles aux agriculteurs et pas seulement rentables pour l’industrie.
- Durabilité : la production massive d’azote pose également des défis environnementaux, notamment en termes d’émissions, d’effluents et d’utilisation de ressources à long terme.
Vers une nouvelle ère pour l’azote africain
L’initiative Dangote – Thyssenkrupp est plus qu’un projet industriel : c’est un pari sur l’avenir agricole et énergétique de l’Afrique. En produisant localement des engrais azotés à haute performance, l’Afrique peut réduire sa dépendance aux importations, stimuler sa productivité et renforcer sa souveraineté économique.
Si l’alliance porte ses promesses, elle pourrait bien marquer le début d’une révolution silencieuse : celle où l’Afrique produit ce dont elle a besoin pour nourrir ses terres, sans toujours compter sur l’extérieur.
La Rédaction

