
La Chine tourne une page à l’OMC : Pékin renonce à ses privilèges de pays en développement.
Le 24 septembre 2025, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, la Chine a surpris la communauté internationale. Pékin a en effet déclaré qu’elle ne sollicitera plus les avantages réservés aux pays en développement dans le cadre des futures négociations commerciales à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Une décision aussitôt saluée comme “historique” par Ngozi Okonjo-Iweala, directrice générale de l’OMC, tant elle rebat les cartes de la gouvernance commerciale mondiale.
De l’élève au géant : une transformation assumée
Depuis son adhésion à l’OMC en 2001, la Chine bénéficiait du Traitement spécial et différencié (TSD). Ce dispositif permettait aux pays en développement d’obtenir des délais plus longs pour appliquer les accords, certaines exemptions et des marges de manœuvre dans les subventions.
Mais la situation devenait de plus en plus paradoxale : deuxième économie mondiale, premier exportateur de la planète et puissance industrielle de premier plan, la Chine continuait d’être classée aux côtés de pays fragiles, souvent africains ou latino-américains.
Les pressions internationales, surtout américaines
Depuis plusieurs années, les États-Unis, rejoints par l’Union européenne, réclamaient la fin de ce “privilège injuste”. Washington dénonçait un système permettant à la Chine de profiter de règles conçues pour des économies vulnérables, tout en menant une politique industrielle agressive et compétitive.
Sous l’administration Trump, la pression s’était intensifiée. Aujourd’hui, Pékin choisit de prendre les devants et d’envoyer un signal fort : celui d’une puissance qui assume son poids et sa responsabilité.
Ce qui change concrètement
La Chine restera officiellement un pays en développement au sein de l’OMC. Mais elle renonce aux bénéfices futurs du TSD dans les prochaines négociations. En clair, Pékin accepte de s’asseoir à la table des grandes puissances “à armes égales”, sans demander de délais ou d’exemptions supplémentaires.
Pour les accords déjà signés, rien ne change : la Chine conserve les avantages acquis. Le geste est donc avant tout tourné vers l’avenir.
Un calcul stratégique
Ce choix n’est pas seulement symbolique. Il traduit une stratégie claire :
- Améliorer l’image internationale de la Chine, souvent accusée de jouer sur deux tableaux.
- Redéfinir la relation Nord-Sud dans le commerce mondial, en se posant en leader responsable.
- Préparer ses entreprises à rivaliser sans filet de sécurité, tout en continuant de bénéficier des acquis existants.
Autrement dit, Pékin se présente désormais non plus comme un élève protégé, mais comme un acteur central prêt à écrire les nouvelles règles du jeu commercial.
Une bascule aux multiples implications
Pour l’OMC, cette décision pourrait faciliter des négociations longtemps bloquées par le statut de la Chine. Pour les autres pays en développement, en revanche, la nouvelle met en lumière une fracture : ils ne pourront pas compter sur la Chine pour défendre certains privilèges communs.
Quant aux grandes puissances, elles ne manqueront pas de scruter si ce geste se traduit dans les faits. Car entre l’annonce diplomatique et la pratique commerciale, l’écart peut parfois être large.
En renonçant à son “parachute” de pays en développement, la Chine confirme ce que beaucoup pressentaient déjà : elle ne joue plus dans la cour des protégés, mais bien dans celle des arbitres. Reste à savoir si ce geste de confiance accélérera la réforme d’une OMC en quête de souffle, ou s’il ne sera qu’un symbole sans lendemain.
La Rédaction